
Comment concevoir une formation à distance via Internet ? Voici une méthode efficace en 4 étapes : analyse, développement, implémentation et évaluation.
Cours gratuit pour les enseignants
Beaucoup d’entreprises hésitent encore à créer un cours en ligne ou une formation mixe (blended learning : qui allie cours en présentiel et formation à distance). Comment s’y prendre ? Quelles sont les étapes à respecter ? Et surtout, comment retenir l’attention des apprenants, sachant que les abandons sont très nombreux dans ce type d’apprentissage ?
Je suis moi-même confronté au problème en tant que formateur, concepteur de formation mais aussi en tant que participant à de nombreux MOOCs (Massive Online Open Courses – cours massifs en ligne et gratuits). Je suis donc toujours à la recherche d’outils et de méthodes qui me permettent d’améliorer la qualité de mes cours, de les rendre plus attractifs pour les étudiants et donc d’abaisser le taux d’abandon.
Et, tout au long de mes recherches, j’ai glané quelques trouvailles intéressantes que j’ai envie de partager avec vous. Que ce soit en matière de conception des cours eux-mêmes ou de méthodes pour rendre les formations à distance plus conviviales et attrayantes, plus « user friendly » comme le dit joliment l’expression anglaise.
Aujourd’hui, je vous propose une méthode de conception de formation à distance en quatre étapes. Je n’ai rien inventé, c’est une méthode proposée par Debbie Morrison sur son blog Online Learning Insights. Mais je la trouve suffisamment intéressante et bien structurée. C’est en fait la formalisation de beaucoup de nos efforts empiriques de concepteurs de formation.
Le « Course design » inspiré du « design éducatif«
Debbie Morrison s’est inspirée d’un ouvrage de Klaus Krippendorf, sur le design, ses origines philosophiques et ses relations avec le langage. J’aime beaucoup cette conception que Debbie Morrison appelle « course design » : « Design ou conception de cours« . Le « course design » s’inspire de « l’instructional design » qu’on peut traduire par « design éducatif« . Le design éducatif a déjà une longue vie derrière lui puisque, si l’on en croit cet article de Wikipedia, les premières tentatives remontent à la seconde guerre mondiale et à la formation des officiers.
Le « course design » est une conception de la formation centrée non sur les méthodes d’enseignement, mais sur les méthodes d’apprentissage. Sur la façon dont les étudiants apprennent et non pas sur la manière dont les professeurs ou formateurs enseignent.
Il ne s’agit pas de jouer sur les mots, mais de changer de point de vue. Et ce changement de perspective entraîne aussi des modifications de pratiques pédagogiques.
Les cours sont centrés sur l’apprenant et non sur l’enseignant. Et sur les meilleurs outils et méthodes pour susciter l’envie d’apprendre en ligne…
Debbie Morrison propose un « processus de développement de cours » basé sur les éléments suivants :
- un plan éducatif : qui détaille la façon dont les contenus seront proposés aux apprenants
- du matériel d’apprentissage : pour les étudiants; du contenu original ou acheté ailleurs
- des activités variées: qui incitent les étudiants à réutiliser et à appliquer les nouvelles connaissances
- des méthodes d’évaluation : utilisées selon le contexte et les objectifs de la formation
Le processus de conception de cours se déroule selon quatre étapes que je détaille ci-après :
- l’analyse du problème et des besoins
- le développement
- l’implémentation
- l’évaluation et la révision
Première étape : l’analyse des besoins et des objectifs
J’ai illustré ces quatre étapes en détail dans la mindmap ci-dessous, dessinée avec iMindMap 7 (que vous pouvez télécharger gratuitement de ma page Biggerplate comme d’habitude).

La première étape consiste à analyser les besoins et les problèmes du public visé. Cela vous aide à fixer les objectifs du cours. Et surtout, à vous assurer qu’ils répondent bien au besoin identifié.
Ensuite, analysez le public-cible :
- quel est son background – Est-il encore étudiant ou bien est-ce un professionnel qui désire se perfectionner ? C’est tout-à-fait différent !
- quelles sont ses motivations ? S’améliorer ? Obtenir une certification ?
- quel est son niveau de compétences ? Est-il débutant ou expert ?
- quel est son accès à Internet ? Du haut-débit ou une connexion téléphonique archaïque ? Apprend-t-il via un PC de bureau, un portable, une tablette ou un smartphone ?
Lorsque vous connaissez votre public, attachez-vous à définir votre approche pédagogique :
- plutôt connectiviste ?
- plutôt constructiviste ?
- plutôt instructiviste ?
Définissez les objectifs d’apprentissage pour chaque séquence pédagogique.
Analysez les modes de distribution de vos contenus : synchrone ou asynchrone ? Uniquement en ligne ou en apprentissage mixte (blended learning) ?
Quels sont les outils Internet qui correspondent le mieux à vos besoins et à ceux de vos apprenants ?
Enfin, déterminez vos sources de contenus en fonction de vos objectifs pédagogiques.
Deuxième étape : le développement de votre cours
C’est à présent le moment de développer une stratégie d’apprentissage !
Mélangez les contenus d’apprentissage : ceux que vous développez vous-même, ceux que vous réadapter de formations antérieures, que vous empruntez à d’autres formations, voire à des productions de vos étudiants.
C’est le moment aussi de mettre en place vos méthodes d’évaluation : quiz, évaluation par les pairs, forums, etc. Déterminez les critères de réussite pour chaque type de méthode.
Créez et décrivez des activités variées afin d’inciter vos apprenants à utiliser les nouvelles notions et/ou compétences acquises lors de votre formation : travaux pratiques, projets, travaux de groupes, etc.
Identifiez aussi les critères et méthodes d’évaluation de votre cours : que les participants puissent vous aider à l’améliorer via un feedback intéressant.
Troisième étape : l’implémentation de votre formation en ligne
Afin de vérifier que tout fonctionne et que votre méthodologie rencontre les besoins de votre public, lancez un cours-pilote à destination d’un petit groupe d’apprenants issus de votre public.
Procédez à une évaluation formative : qu’ont réellement appris ces personnes qui ont passé le premier test de votre formation ?
Sur base de ce feedback, révisez votre formation : adaptez certains contenus, supprimez-en certains autres (pas d’état d’âme ! ils pourront peut-être être réutilisés pour d’autres modules). Et ajoutez certaines choses qui pourraient manquer…
Procédez à des évaluations formative et sommative avec votre groupe-pilote. Et tirez-en les conclusions en passant à l’étape 4 :
Quatrième étape : l’évaluation et la mise à jour
Rassemblez le feedback que vous avez obtenu de diverses sources, que ce soit au niveau qualitatif ou quantitatif.
Analysez ce feedback. Tenez compte aussi de facteurs externes à votre formation. Il suffit que vous ayez programmé le lancement de votre cours à un moment où les personnes prennent leurs congés pour diminuer significativement les taux de participation…
Comparez vos résultats avec ceux d’institutions d’éducation comparables : analysez leurs mesures quantitatives et qualitatives. Que vous disent les résultats ? Etes-vous dans la moyenne ? Au-dessus ? En-dessous ?
Et au besoin, révisez vos phases d’analyse (quelque chose vous a peut-être échappé) et/ou de développement (la progression pédagogique est peut-être à revoir : j’ai changé la méthode de langue que j’utilisais avec mes étudiants à Maastricht. Et j’en ai pris une qui respecte mieux la progression attendue de mes étudiants. Résultats : moins de découragement, plus de plaisir, plus de résultats positifs…).
Ensuite, démarrez tout le processus en gardant à l’esprit que tout peut être améliorer à tout instant…
Vous l’aurez compris, il ne s’agit pas d’une méthode miraculeuse, mais de la mise en place d’une méthodologie structurée. Cela demande du travail et aussi beaucoup d’humilité face à ce que le feedback de vos apprenants vous renvoie.
Je continuerai à vous faire part de mes investigations dans ce domaine, notamment de l’apport de la gamification dans les cours en ligne.
Vous avez aimé cet article ? Inscrivez-vous à ma newsletter et ne ratez plus aucun article ou événément !
bonjour,
peut on enseigner l’architecture avec cette méthode?
Bonjour,
oui, bien sûr, il existe de nombreux cours d’architectures, comme des MOOC sur Edx ou Coursera ou encore Future Learn qui utilisent ce type de méthode ou la méthode du design thinking comme j’en parle ici : https://format30.com/2016/06/06/comment-concevoir-un-cours-en-ligne-avec-la-pensee-design/
A reblogué ceci sur AWBC blog.
Tu parles de pensée Design pour concevoir un scénario pédagogique. peux-tu mettre un exemple de prototypage de scénario pédagogique pour Voir à quoi cela ressemble ?
Bonjour Marco tu parles de pensée Design pour la scénarisation pédagogique. Peux tu mettre un exemple de prototypage de cours pour Voir à quoi cela ressemble.
C’est tout simplement une version complète du cours que tu souhaites utiliser. Par exemple, pour la formation Gérez vos projets avec le Mind Mapping que nous avons créée avec Pierre Mongin. Nous avons demandé à des personnes de faire tout le parcours et de nous indiquer ce qui fonctionnait ou pas, ce qu’elles pouvaient comprendre ou non. Et pour chacun des éléments qu’elles nous ont signalés, nous avons corrigé, reformulé, voire remplacé la ressource.
Il ne s’agit pas d’un échantillon mais d’une première, voir d’une seconde version du cours complet.
Bon article, merci Marco. Une autre source intéressante : la série de 5 articles écrits par Elodie Lestonat sur la La scénarisation pédagogique pour Thot Cursus. https://storify.com/thot/la-scenarisation-pedagogique?awesm=sfy.co_baB0
Bonjour Gilles, merci pour ce commentaire amical 😉
Oui, je connais cette série d’articles. Personnellement, je travaille plutôt selon la philosophie de la pensée design qui place davantage l’apprenant au centre du processus de développement.
Excellent weekend et à bientôt 😉
j’aime
C’est un bon article, mais je veux passer à l action. C est a dire je veux savoir quels sont les outils nécessaires pour chaque étape ?.
Bonjour,
Pour les outils nécessaires à cette étape, je vous propose de vous inscrire à notre formation « Créez votre cours en ligne » qui traite de cette matière et passe les outils en revue. http://www.spocenstock.com/creez-votre-cours-en-ligne.html
j’aime bien votre article car il traite d’une thématique sur laque j’aimerai rédiger ma thèse de doctorat. MERCI pour les éclairages
Merci pour cet article détaillé et tous ces conseils sur la formation à distance,
Avec plaisir 😉
J’ai découvert avec intérêt que l’ordre dominicain avait ses propres formations en ligne.
Bravo !
A reblogué ceci sur Eva Guerda.
Bonjour,
J’aime bien votre article mais qu’en est-il en matière de création de contenu ? Comment créer du bon contenu pour son cours en ligne ?
Ca fera l’objet d’un prochain article, voire de plusieurs prochains articles. Un peu de patience. Et merci pour le commentaire sympa 🙂
Pourriez vous êtes le consultant que je recherche pour encadrer un groupe d’une dizaine de formateurs à construire leurs cours en ligne?
Merci de votre retour.
Philippe Chassemon
Bonjour,
Pourquoi pas ? Je vous réponds par e-mail,
bon dimanche
Marco.
Cette page jadore
Bonjour Marco.
Je voudrais « embedder » ta carte (en te citant bien entendu) dans une page d’un Moodle pour des profs où je donne déjà le lien vers ton article.
Je suis myope …et n’ai pas repéré une solution pour cela dans ton article.
Est-ce possible ?
Gilles
Hello Gilles,
De quel format aurais-tu besoin ? C’est une carte iMindMap, on peut l’exporter sous format image, SVG, html…
Dis-moi celui qui te convient et je te le transmets,
amicalement,
Marco.
Merci 🙂 Html, c’est l’idéal pour moi 🙂 Tu as mon mel ?
Le « course design » de Debbie Morrison me fait penser à la pédagogie de La Garanderie, basée sur les méthodes d’apprentissage de l’élève.
Comme toujours, article de qualité.
Merci
Merci à vous pour ce commentaire sympa 😉
Oui, dans le course design, on distingue de plus en plus l’e-learning, centré sur l’apprenant, de l’e-teaching, centré sur le professeur ou le formateur.
De nombreux systèmes, présentés comme de l’e-learning, sont en fait de l’e-teaching… La reproduction en ligne de la relation maître-élève qui perd de plus en plus son sens à l’ère de la connectivité et du savoir accessible partout et en tout temps…
Bonne soirée,
Marco.
Bon article.
Je suis assez d’accord sur l’ensemble des points de cette méthode; essentiellement sur les cours centrés sur l’apprenant et non sur l’enseignant avec des outils et méthodes pour stimuler l’avis d’apprendre en ligne, le tout j’ajouterai, basés sur de l’interactivité.
Merci pour ce commentaire positif 😉
Oui, c’est la grande préoccupation du moment : comment rendre les cours en ligne plus interactif ? Il est vrai qu’on apprend d’autant mieux qu’on peut interagir avec l’environnement d’apprentissage, avec ses pairs, avec le ou les enseignants/formateurs, etc.
C’est la faiblesse de certains MOOCs, notamment, de proposer un cours ex cathedra en ligne, sans réelles opportunités d’échanges et d’interactions. C’est malheureusement encore trop souvent le cas dans les autres formations en ligne, nous sommes bien d’accord.
Bonne journée,
Marco.
merci à qui de droit pour cet excellent article
Merci pour ce commentaire élogieux 😉
Bon week-end, Hélène !